Le festival de Cannes 1968 fut fertile en émotions. Truman Capote, flanqué de la sublime Sharon Tate y présentait sa première oeuvre de cinéaste. Hélas, cet évènement culturel fut éclipsé par un nouveau phénomène de société: celui de l’avènement d’un nouveau type féminin né en Angleterre: les « Birds ». Les « birds » sont de filiformes mais très avenantes jeunes filles, cheveux longs, jupes ultra courtes et adeptes de toutes les libertés!
Julie Christie en fut la pionnière, la reine et l’égérie. Charlotte Rampling lui emboîta le pas d’une élégante foulée. Lynn et Vanessa Redgrave furent tentées. Les stars internationales, Brigitte Bardot en tête, Catherine Deneuve et Sharon déjà citée se mirent au goût du jour made in « Swinging London ». Le nouveau type féminin devint incontournable et de Géraldine Chaplin en passant par Barbara Bouchet, Marisa Mell, Romina Power et Geneviève Grad, tout le monde l’adopta. Seule Françoise Hardy contempla les choses d’un oeil serein, ce nouveau phénomène ne faisait que mettre son look habituel à la pointe de la mode!
Dans cette mouvance, surgit surgit dans les flots bleus juste en face du Carlton, la belle et blonde Carol White, vedette de « Poor Cow » . Dans sa foulée, mêmes cheveux au vent, même mini jupe microscopique Erica Raffael que l’on voyait dans » Trois Petits tours et puis s’en vont », Titre hautement prémonitoire en ce qui la concerne.
Les festivaliers furent unanimes: Carol White allait détrôner la belle Julie Christie!
Carol n’était pourtant pas une débutante, loin de là.
Miss Carol Joan White naquit à Londres, dans le quartier d’ Hammersmith, le 1 Avril 1943 ce qui permettait de lui faire des blagues toute l’année. Ses parents n’étaient guère fortunés, son père était ferrailleur et dès son plus jeune âge, la ravissante Carol va se consoler de la grisaille de sa vie en collectionnant les photos de Marilyn Monroe jusqu’à ce que Brigitte Bardot lui succède dans ses passions admiratives.
Elle aussi, bien entendu, voudra devenir une star de cinéma.
Elle était venue aux écrans assez tôt, à l’âge de six ans. Elle continua sur sa lancée, se retrouvant au sortir de l’adolescence dans des rôles de sages jeunes filles blondes un tantinet espiègles. Dans le type de rôles que l’on confiait alors volontiers à une Hayley Mills après les avoir confiés longtemps à Sandra Dee. A cette exception près que si Hayley était au sommet des affiches, Carol était au fond. Carol, baignée dans les visuels de Marilyn et Brigitte depuis ses premiers pas s’émancipa en devenant à son tour une copie conforme de Brigitte Bardot à l’usage du public anglais. Cette seconde étape ne lui rapporta pas la gloire mais un mari et deux enfants.
Il serait également injuste de croire en un quelconque échec relatif de la belle enfant au cinéma. Carol White a donné la réplique aux plus essentiels monstres sacrés du cinéma british dont Diana Dors, Stephen Boyd, Dirk Bogarde, Alec Guinness, Peter Sellers, James Robertson Justice, Joan Greenwood ou Valérie Hobson. Sans toutefois grimper au sommet des affiches. Carol White mettra plus de dix ans avant d’enfin se voir convier un rôle déterminant dans l’intrigue du film!
La belle actrice aurait d’ailleurs pu raccrocher sa panoplie de vedette et se consacrer à sa petit famille mais la passion du métier d’actrice fut la plus forte. Elle adopta un nouveau look dans la foulée de celui que venait d’imposer Julie Christie et décrocha coup sur coup deux rôles où elle triompha littéralement: « Suzie Come Home » et « Poor Cow » qui lui valut les grands honneurs médiatiques du festival de Cannes. Si Julie Christie prônait à tout va la liberté sexuelle, Carol, épouse et mère se tenait sur des positions plus réservées. Malgré sa jupe plus courte que sa ceinture elle était à Cannes accompagnée de son mari et de ses deux enfants âgés respectivement de quatre et cinq ans. Carol s’était mariée en 1962.
Mais ces belles paroles rassurantes aux oreilles des producteurs et des familles n’étaient que du vent. Non seulement le couple était en instance de divorce lors de son arrivée au festival mais Carol avait déjà mis le pied dans l’engrenage fatidique de la sur consommation d’alcool et de drogues dures. La plus sage n’était pas celle que l’on croyait!
Divorcée, Carol échoua dans les bras accueillants de Frank Sinatra, de Richard Burton et de l’inévitable Warren Beatty. dans son nuage psychédélique elle crut à chacune de ces histoires qui furent tout pour elle et rien pour ses partenaires de passage. La belle pourtant considérée comme l’actrice la plus prometteuse depuis l’avènement de Julie Christie et Vanessa Redgrave commença l’inévitable dégringolade des alouettes naïves aux ailes trop inflammables.
De comportement instable et oubliant son texte à loisir, le cinéma Anglais se détourna sans hésiter de cette comédienne risquée. Carol White profita d’une très opportune proposition hollywoodienne pour fuir Londres et gagner l’Amérique où sa réputation n’était pas encore entachée par son comportement anarchique. Le tout n’avait pris que quelques semaines.
Hollywood, pourtant ne fit pas grand cas de cette nouvelle recrue.
Carol White ne réussit jamais à vaincre ses démons et bien qu’elle soit restée active jusqu’à la fin des années 70. Sa vie ne fut plus qu’une rémission entre deux déchéances et sa carrière de longs silences entre deux tournages de moins en moins prestigieux.
Elle s’éteignait en Floride le 16 Septembre 1991. elle n’avait que 48 ans et était restée, malgré ses excès, toujours très belle.
Sa mort fut entournée d’une brève polémique: on l’avait retrouvée, telle Marilyn gisant à côté de tubes de barbituriques vides et la thèse du suicide fut évoquée bien que l’actrice soit irrévocablement condamnée par une maladie du foie.
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1949: Kind Hearts and Coronets: Avec Dennis Price Joan Greenwood, Alec Guiness et Valérie Hobson
1955: An Alligator Named Daisy: Avec Diana Dors, Donald Sinden et James Robertson Justice
1955: Toubib en Mer: Avec Brigitte Bardot et Dirk Bogarde
1957: Blue Murder in St Trinian’s: Avec Terry Thomas et Lionel Jeffries
1959: Les 39 Marches: Avec Kenneth Moore, Brenda de Brazie et Taina Elg.
1960: Never Let Go: Avec Richard Todd Peter Sellers et Elizabeth Sellars
1961: The Man in the Black Seat: Avec Derren Nesbitt
1962: The Boys: Avec Richard Todd et Robert Morley
1967: Slave Girls: (prehistoric Women) un chef d’oeuvre de la « Hammer »
1967: Poor Cow: Avec Terence Stamp
1971: Something Big: Avec Dean Martin