germaine montero

Germaine Montero est un cas à part dans l’histoire du film et même du spectacle.

Cette parisienne naît à Paris le 22 octobre 1909 sous le patronyme complet de  Germaine Berthe Caroline Heygel. Son père est alsacien, sa mère normande et j’ignorerai probablement toujours pourquoi la famille Heygel s’exila en Espagne, une émigration à contre courant en somme.

C’est en Espagne qu’elle s’est complètement entichée du théâtre de Federico Garcia Lorca. C’est en interprète de ses oeuvres qu’elle débute sur les scènes madrilènes. Elle a dix-huit ans et non 23 comme l’affirme sans scrupule aucun sa fiche Wikipédia. Nous sommes en 1927 et non en 1932. « La Maison de Bernard », « Les Noces de Sang » lui amènent la célébrité chez les Ibères les plus intellectuels.

Germaine aurait pu devenir une icone des scènes espagnoles, telle une Edwige Feuillère mais la guerre civile va la chasser. Ce ne sera pas la seule fois.

Nous sommes en 1938, Germaine à 29 ans. Elle retrouve son Paris natal qui ignore tout d’elle…Ou presque. Si Germaine vivait et travaillait en Espagne, elle avait gardé des attaches parisiennes et c’est lors d’un de ses séjours à Paris que Léonce Perret la retint pour « Sapho » où elle aurait pour ses débuts au cinéma à affronter…Mary Marquet!

A Paris, et surtout à l’époque, être une artiste complètement inconnue à 29 ans c’est comme être morte, ou plus exactement n’avoir jamais existé. A cet âge là, beaucoup de carrières féminines sont déjà terminés, chassées par de nouvelles « jeunes premières ».

germaine montero

Alors Germaine court les théâtres, les audition et comme la vogue des cabarets bat son plein, elle a l’idée de proposer un mini récital de chansons espagnoles inconnues en France. C’est Agnès Capri qui, séduite, l’invite à se produire dans son cabaret. Le succès de curiosité devient succès d’estime puis succès tout court.

Une réussite en entraînant une autre, le nom de Germaine Montero circule dans Paris. Elle avait passé des auditions, on l’engage pour une pièce de…Garcia Lorca (Qui pouvait la supplanter?) et elle enchaînera avec « Mère Courage » de Bertold Brecht où elle fait une véritable triomphe. L’Italie fait appel à elle pour son cinéma et, une nouvelle fois, la fureur des hommes brouille les cartes du destin.

C’est la guerre, Germaine, comme tout le monde fuit la capitale occupée, passe en zone libre. Elle reprend la tournée des cabarets, il faut bien vivre, guerre ou pas. Elle se fixera longtemps à Lausanne où on se bagarre tous les soirs pour venir l’entendre et trouvera même le moyen de tourner un film durant l’occupation « Le Soleil a toujours raison » avec Tino Rossi et Charles Vanel. Germaine avait littéralement cassé la baraque! On comparait sa beauté à celle de Viviane Romance et son abattage à celui de Suzy Delair! Rien de moins!

germaine montero

La guerre enfin se termine alors que Germaine fait un triomphe à Genève avec « Madame sans gêne ». Elle rentre à Paris mettre le feu au théâtre des Mathurins avec « Divines Paroles » puis renoue avec le cinéma avec « La maison sous la mer » d’Henri Calef. Que se passa-il alors sur le tournage? La vedette du film, Viviane Romance (tiens) flanquée de son légitime pour partenaire (qui lui donne raison en tout vu que c’est elle qui gagne les gros sous) prit-elle ombrage de la présence de Germaine?

Si leurs beautés pouvaient être comparées sans que Viviane n’ait trop à s’en faire, il n’en va pas de même pour la présence à l’écran et la force d’interprétation. J’ignore si c’est là que se cache la clé du mystère. Quoi qu’il en soit, Germaine fut entièrement liquidée au montage!

S’en offusqua-elle? Rien n’est moins sûr puisqu’à la sortie du film elle était en scène avec Gérard Philipe et Jeanne Moreau au festival d’Avignon. Viviane Romance pouvait bien aller se faire cuire les fesses avec son Clément Duhour, on ne jouait plus dans la même cour!

Germaine sera un des piliers du festival jusqu’en 1949 puis renouera avec le cinéma. Mais malgré une carrière d’actrice honorable, c’est sur scène, c’est en chantant que finalement elle se sent le mieux. La radio qui a fait son entrée dans tous les foyers lui amène un succès retentissant! Tous ses enregistrements sont plébiscités, ses disques s’arrachent. Qu’irait-elle faire sur un plateau de cinéma avec Viviane Romance?

Si Edith Piaf est la reine incontestée de la chanson française, Germaine Montero lui dame le pion sur d’autres terrains autrement plus exigeants. Elle ne peut se comparer qu’à Damia tout en étant plus avare encore d’effets. Loin de rouler des R de manière grand guignolesque comme une Edith Piaf qui se croit sans née à Bucarest, Germaine Montero sert le texte et à travers lui l’auteur. Il faut donc que le texte soit bon et l’auteur meilleur encore. Elle ira chez Prévert chercher ses feuilles mortes, chez Pierre Mac Orlan chercher une noirceur cynique et dôle à nover sous la plainte d’un accordéon. Elle ira chez Léo Ferré ou piocher chez Bruant. Elle ne sera pas une sous Edith Piaf des rues basses et continuera de servir le folklore espagnol. C’est ce répertoire qui lui vaudra le grand prix du disque en 1953 sous le nez de Piaf qui le briguait pour « Bravo pour le clown ».

En 1956 son passage à l’Olympia entre dans la grande histoire du music hall et l’académie Charles Cros lui remet son grand prix en 1970.

La gravité et l’intellectualité de Germaine Montero chanteuse allait bien avec la génération des Brassens, des Ferré des Barbara. Elle n’avait plus rien en commun avec la déferlante yéyé des idoles. Mais il serait faux de la croire recluse, oubliée ou même nostalgique.

Germaine Montero travaillera encore au théâtre, à la radio, à la télévision et même au cinéma jusqu’à la fin des années 80.  Elle tournera même pour Lelouch ne vous en déplaise. Elle est la mère de Charles Denner dans « Robert et Robert ». Et si elle ne fit plus de cabaret, c’est que ceux-ci avaient tous disparu. Tués par l’arrivée des…Juke-box!

Germaine Montero s’est éteinte tout doucement dans sa retraite de Saint Romain en Viennois le 29 juin 2000 à 90 ans. Elle était toujours mariée à Jean-Mario Bretschy. Ils s’étaient rencontrés durant l’exils suisse de la guerre et ne s’étaient plus quittés pour un mariage de près de 60 ans.  Jean-Mario était le cadet de Germaine de deux ans et il ne lui survivra que deux ans.

Celine Colassin

germaine-montero fernandel

QUE VOIR?

1934: Sapho: Avec Mary Marquet

1943: Le soleil a toujours raison: Avec Micheline Presle, Tino Rossi et Charles Vanel

1950: Lady Paname: Avec Suzy Delair

1950: Casimir: Avec Fernandel

1954: La belle Otero: Avec Maria Felix

1954: Monsieur Ripois: Avec Gerard Philipe  et Valérie Hobson

1955: Treize à table: Avec Micheline Presle et Fernand Gravey

1956: Don Juan: Avec Fernandel et Carmen Sevilla

1958: Les jeux dangereux: Avec Pascale Audret et Jean Servais

1962: Le masque de fer: Avec Jean Marais

1963: Mélodie en sous-sol: Avec Alain Delon

1965: Dis-moi qui tuer: Avec Michèle Morgan

1966: La Curée: Avec Jane Fonda

1973: Une saison dans la vie d’Emmanuel: Avec Claude Richard

1975: Le Chant du Départ: Avec Brigitte Fossey et Rufus.

1978: Robert et Robert: Avec Charles Denner et Jacques Villeret

1984: Stress: Avec Carole Laure

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