Retracer le parcours de la fort belle Leny Marenbach est devenu très difficile aujourd’hui. Etrangement, les films de cette belle vedette allemande s’exportèrent mal. Restée méconnue en dehors de ses frontières teutonnes, la belle en outre, venait du théâtre et aurait préféré y rester. Elle ne vint que tard au cinéma, elle avait 28 ans. L’âge où d’autres déjà voient leur carrière s’achever. Et parce qu’il s’agissait de jouer un rôle sans complaisance dans « Jana, Das Mädchen aus Dem Böhmerwald ». Jana est une paysanne mal dégrossie qui ignore l’existence de la paillette et de l’étole de renard blanc. A peine connaît-elle celle du peigne. C’est la composition d’un personnage qui avait attiré Leny devant les caméras, pas le gling-gling des studios UFA.
Leni Marenbach naît à Essen non loin de Düsseldorf le 20 Décembre 1907.
En 1923, elle n’a que 16 ans lorsqu’elle fait ses débuts au théâtre de sa ville natale. Elle devient, jeune première de pièces à succès et de comédiens musicales qui en ont tout autant, une véritable petite gloire locale dont on n’est pas peu fiers. Sa réputation ira jusqu’à Munich où on lui propose un contrat au plus prestigieux théâtre de la ville. Ce sera ensuite au théâtre de Zurich de l’inviter. On le voit, il y avait donc plus que dix ans, douze très exactement, que Leny était une vedette des planches avant de se laisser convaincre de tourner « Jana, Das Mädchen aus Dem Böhmerwald ». Elle ne pouvait alors imaginer que son portrait en paysanne presque moche ferait toutes les couvertures des magazines de cinéma et que l’on parlerait d’elle comme d’une grande découverte! C’était à la fois flatteur pour sa prestation mais désobligeant pour sa carrière théâtrale déjà bien fournie.
Evidemment, on lui proposera d’autres films. Comme elle avait débuté dans un rôle fort, on lui proposa des rôles dans le même esprit. Des rôles que l’on estimait impossible à confier à Lillian Harvey ou Marika Rokk! Sans jamais délaisser son cher théâtre, Leny tourna donc. Elle allait avoir l’imprudence ou la chance, qui peut le dire, de tourner un film avec l’acteur Heinz Rühmann. Leny et Heinz ont une liaison sur le tournage de leur premier film, bien que Heinz Rühmann soit marié.
Heinz Rühmann est né comme Leny à Essen. Ce sont deux enfants du pays qui partagent les mêmes souvenirs d’enfance. Mais surtout, Heinz est une superstar énorme en Allemagne où il n’ a pour ainsi dire aucun concurrent. Né en 1902, il a collectionné les triomphes à l’écran depuis 1930. Quand il tourne avec Leny en 1935 il est avec Hans Albert la superstar numéro un en Allemagne.
Evidemment, en Allemagne en 1935, le national socialisme fait déjà fureur, c’est le cas de le dire. Leny ne voit pas cette politique d’un très bon œil. Heinz lui recommande de faire profil bas et de s’abstenir de tout commentaire pour ne pas avoir à se frotter aux sbires d’Hitler et garder un maximum de dignité. Pourtant, lorsque Goebbels exige qu’il divorce de sa femme juive, il s’exécute aussitôt. Leny est outrée! Comment peut-il abandonner son épouse dans une telle période? Heinz Rühmann aura beau argumenter que depuis sa liaison avec elle son mariage battait de l’aile et qu’ils envisageaient le divorce de toute façon, elle le considère comme un lâche, elle le méprise, elle le quitte.
Sans doute pour lui prouver qu’elle a tort, Heinz Rühmann se remarie aussitôt avec une autre comédienne aux origines juives, Herta Feiler. Et il tiendra tête au parti nazi. Sa première femme, quant à elle avait gagné Stockholm avec son nouveau mari et échappera à l’holocauste.
Pour le peuple allemand, la séparation de son couple vedette qui ne tournera plus jamais ensemble c’est un véritable drame. Comme si Fred et Ginger se boudaient à Hollywood! C’était d’ailleurs le cas. Mais pour cause d’embargo hitlérien , les Allemands n’avaient pas de nouvelles fraîches d’Amérique. Leny continuera à tourner, restant fidèle à la ligne de conduite conseillée par Heinz Rühmann. Sans trop se mêler de politique et trouvant une excuse céleste dans ses obligations théâtrales pour poliment décliner les films par trop propagandistes et les grandes soirées officielles du Reichstadt. On la verra même interpréter en crinolines second empire le rôle d’une femme défigurée où elle se fait une tête digne de « L’Homme Elephant »!
Elle verra la fin de la guerre avec un soulagement inouï. Elle était vivante et n’avait à rougir de rien. Personne d’ailleurs ne songera à lui reprocher quoi que ce soit! Ce ne sera pas le cas pour Heinz Rühmann qui malgré ses bons conseils était considéré par Goebbels comme un des acteurs les plus importants du troisième Reich. Il avait tourné sans relâche et si Hitler s’était estimé bafoué par quelques uns de ses films, il pouvait toujours compter sur son ami Göring pour le tirer d’affaire.
Leny avait elle aussi tourné durant la guerre. On l’avait beaucoup vue et maintenant que la paix était revenue l’Allemagne souhaitait passer à d’autres distraction et surtout voir d’autres têtes sur les écrans. Son étoile pâlit mais elle tournera quand même avec régularité des rôles intéressants jusqu’en 1955. Et puis, il lui restait son cher théâtre adoré où le public lui était magnifiquement fidèle.
Elle s’était brièvement mariée avec le caméraman Walter Pindter, de 3 ans son cadet et père de son fils unique.
Leny s’éteint le 26 Janvier 1984, elle avait fêté ses 77 ans un mois plus tôt.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1935: Jana, Das Mädchen aus Dem Böhmerwald: Avec Ewald Basler
1936: Wenn Wir Alle Engel Wären: Avec Heinz Rühmann
1937:Der Mustergatte: Avec Heinz Rühmann
1939: Ehe in Dosen: Avec Johannes Riemann
1939: Zentrale Rio: Avec Camilla Horn
1943: Die Wirtin zum Weißen Röß’l: Avec Dont Kreysler
1955: Wer seine Frau lieb Hat: Avec Albert Grabe