ludmilla tcherina

Ludmilla Tcherina fut plus qu’une actrice et plus qu’une illustre danseuse. Elle fut une véritable reine de Paris durant près d’un demi siècle. Chacune de ses apparitions était plus qu’un événement, c’était un spectacle. Une leçon de grâce et d’élégance! N’avait-elle pas éclipsé la jeune reine d’Angleterre au grand bal donné en son honneur lors de sa première visite officielle à Paris? Dans une robe de tulle blanc, telle une rose noire posée sur un nuage, elle avait été la reine du bal. Alors que Martine Carol pourtant la plus grande vedette française du moment8 était montée sur le toit d’un immeuble pour assister de loin aux festivités auxquelles elle n’était pas conviée.

C’est que Ludmilla Tcherina était elle aussi une reine. Une reine couronnée de gloire et de prestige.

ludmilla tcherina

Monique Tchemerzine vient au monde le 10 Octobre 1924 dans le quinzième arrondissement de Paris. Si son père est un authentique prince russe exilé à Paris à la révolution, sa maman est française et réputée comme une historienne de haut vol. Ses ouvrages font autorité dans les matières qu’elle traite.  Le père quant à lui est un mathématicien à qui on doit entre autres choses l’invention des fusées éclairantes. Née de parents extrêmement intellectuels, la petite Monique qui se fera très tôt appeler Monika se révèlera passionnée de danse dès le berceau. Elle commencera le dur écolage de danseuse classique dès l’âge de…3 ans! Plus tard elle ajoutera le mime à ses compétences, devenues redoutables, pour parfaire son art et reculer encore les limites de l’expression.

Ludmilla Tcherina fera ses débuts sur scène dès l’âge de dix ans. Elle est encore adolescente lorsque les Allemands envahissent Paris. Les Tchemerzine passent immédiatement en zone libre et ce qui aurait dû être une catastrophe pour la jeune danseuse va se révéler être une aubaine! Elle fait la rencontre sur la côte d’Azur de Serge Lifar qui l’accepte en audition. Aussitôt subjugué, il fait d’elle la plus jeune danseuse étoile  des ballets de Monte Carlo dont il a alors la direction. Ludmilla Tcherina reste à ce jour la plus jeune prima ballerina de l’histoire.

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La guerre terminée, Ludmilla rentre à Paris et intègre les ballets de Roland Petit où elle se fera une irréductible ennemie en la personne de Zizi Jeanmaire! Elle rentre à Paris mariée, elle a épousé le danseur étoile Edmond Audran, alors premier danseur aux ballets de Monte Carlo, son partenaire sur scène.

Infatigable touche à tout, curieuse au possible,  assoiffée d’expériences et de découvertes; Ludmilla danse au Métropolitan de New-York, au cinéma ou participe à des opérettes avec…Henri Salvador! Dès 1949, Christian Jacque la fait débuter au cinéma dans « Un Revenant » avec Louis Jouvet, Gaby Morlay et François Périer!

Ludmilla vient de terminer le tournage des « Contes d’Hoffmann »  lorsqu’en Juillet 1951, son mari se tue en voiture. On la dit désemparée, Edmond Audran était devenu son chorégraphe officiel. Elle déclare vouloir tout abandonner à commencer par la danse. Deux choses vont la faire changer d’avis. Le triomphe de son film tout d’abord et la tendre liaison qu’elle mène en Amérique avec Robert Taylor divorcé de frais.

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Ludmilla niera farouchement toute liaison: « Nous sommes deux amis, nous nous consolons, il souffre de son divorce et moi de la perte de mon mari. Nous passons des soirées entières à parler de ceux que nous aimons et que nous avons perdu » Ce à quoi un commère hollywoodienne à la plume acérée réagit « Comment font-ils?  La Tcherina ne parle pas un mot d’anglais et si Robert Taylor était doué pour les langues étrangères on serait au courant! » Les principaux concernés laissèrent dire mais continuèrent à nier farouchement toute romance!

Le 28 Mai 1953, Ludmilla épousa en secondes noces le richissime Raymond Roi qui devint comme il est d’usage pour une danseuse son riche protecteur. C’est lui qui l’encouragea à reprendre sa carrière de danseuse là où elle l’avait momentanément laissée.

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Avant son mariage, Ludmilla faisait bien un peu de cinéma, jouant essentiellement des rôles de prima ballerina et passait son temps libre disait-elle à décorer des bougies comme on le faisait en Russie, songeant même à ouvrir une boutique de « bougies de fêtes »

Elle reprendra donc sa carrière de danseuse et d’actrice avec infiniment de prestige, réussissant la prouesse d’être célèbre en Europe et adorée en Amérique. Ludmilla est de celles que Douglas Sirk appelle d’Hollywood pour lui confier un premier rôle! Elle sera une authentique vedette de cinéma durant plus de 15 ans. En 1961, voulant frapper un grand coup, elle met toute sa fortune personnelle dans la production d’un film tout dédié à sa gloire. Ludmilla avait triomphé dans le ballet « L’Amante de Teruel », elle finance son adaptation au cinéma. C’est Raymond Rouleau qui se chargera de mettre le projet en scène. L’accueil cannois sera très mitigé et Ludmilla ne rentrera pas dans ses frais!

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Raymond Roi laissa Ludmilla Tcherina veuve en 1987. Il y avait longtemps qu’elle ne tenait plus les grands premiers rôles des ballets classiques sur toutes les scènes du monde dont la Scala de Milan. Mais elle continuait à danser et surtout à paraître dans le tout Paris, souvent au bras de son inséparable ami Jacques Chazot. Sa beauté s’était figée dans les turbans et les foulards masquant d’improbables liftings mais elle gardait la finesse et la souplesse d’une danseuse étoile dont la gloire semblait se figer dans l’éternité. Toujours maquillée comme pour danser Coppélia « la fille aux yeux d’émail » elle aimait à se montrer dans des robes de très haute couture comme il convenait à son standing.

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Sa gloire de danseuse s’était complétée de sa renommée d’écrivaine, de peintre et de sculptrice. On avait dit de Ludmilla Tcherina qu’elle était la Callas de la danse mais son crépuscule fut moins amer. Le grand public la connaissait même sans être féru de ballets classiques. La télévision, sûre de l’audience d’un programme avec Ludmilla Tcherina lui offrira de beaux grands rôles. Anna Karénine, la Dame aux Camélias, Salomé ou la reine de Saba.

Lorsqu’elle s’éteignit après une longue lutte contre la maladie le 21 Mars 2004 le tout Paris dont elle avait été la reine était lui aussi déjà mort et sa disparition fut discrète comme il sied à une grande dame. Quand on sait vivre on doit savoir mourir et tirer sa révérence sans tapage.

Le destin ne lui aura pas permis d’avoir 80 ans qu’elle aurait moyennement fêtés 7 mois plus tard.

L’art de la danse a ceci de particulier qu’il est à la fois le plus exigeant de tous et le plus éphémère.

Ludmilla Tcherina fut la seule étoile étrangère aux ballets du Bolchoï .

Celine Colassin

ludmilla tcherina

QUE VOIR?

1946: Un Revenant: Avec Gaby Morlay et Louis Jouvet

1948: The Red Shoes: Avec Moïra Shearer

1948: Fandango avec Luis Mariano

1950: La Belle que Voilà: Avec Michèle Morgan et Gérard Oury

1951: The Tales of Hoffmann: Avec Moïra Shearer

1951: Clara de Montargis: Avec Michel François

1951: Parsifal: Avec Gustavo Rojo

1952: Grand Gala: Avec Odile Versois et Yves Vincent

1953: Spartaco: Avec Yves Vincent et Massimo Girotti

1954: La Figlia di Mata Hari: Avec Frank Latimore

1954: Sign of the Pagan: Avec Jeff Chandler et Jack Palance

1955: Oh… Rosalinda! Avec Anthony Quayle et Michael Redgrave

1959: Lune de Miel: Avec Anthony Steele

1962: Les Amants de Teruel: Avec René-Louis Fallorgue

 

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