mimsy farmer

Toutes les petites filles ont, pour les aider à passer au cap de l’adolescence, un modèle, une vedette une icône, un idéal. Qu’elle soit chanteuse, actrice, mannequin ou présentatrice à la télévision. La mienne fut sans aucun conteste ni aucune rivalité l’actrice Mimsy Farmer. Elle était d’ailleurs la seule actrice contemporaine qui éveillât en moi un intérêt. A l’époque déjà il fallait s’appeler Marlène Dietrich, Sophia Loren, Jean Harlow ou Ava Gardner pour m’intéresser même vaguement. Mais Mimsy c’était autre chose qu’une admiration de juvénile spectatrice à actrice. Elle était mon idéal. Je voulais être Mimsy. Je la trouvais formidable! Tout sur elle avait du style, de la classe alors qu’elle se montrait d’un naturel déconcertant. Il me semblait que Mimsy Farmer était la quintessence  de l’idéal féminin des années 70 qui s’annonçaient. Je n’étais pas la seule. Sa modernité coupait le souffle. Elle avait succédé dans mes admirations à Ursula Andress puis à Elsa Martinelli. Elle sera mon dernier idéal.

Je l’admirais à un point tel que je ne lui tins aucune rigueur d’une mésaventure que je lui dois. Etant interdite de cinéma non accompagnée, J’avais réussi à traîner ma grand mère voir « La Route de Salina », il y avait beaucoup de « gens tout nus » sur les photos promotionnelles du film mais elle avait surtout vu le nom de Rita Hayworth à l’affiche. C’était son actrice préférée parce qu’elle la confondait avec Susan Hayward, Nous y allâmes donc. Cet été là, je m’apprêtais à avoir 13 ans et nous allions partir pour la Croatie, alors Yougoslavie.

Dès le lendemain je me ruai chez le coiffeur avec ma cagnotte glanée à mon anniversaire et lui expliquai que je voulais être Mimsy Farmer. C’est à dire avec les cheveux ultra courts et blonds « le plus clair possible » Ce brave homme, tout sympathique soit-il ne connaissait pas Mimsy Farmer, n’avait pas vu le film et moi je n’avais pas de photo de mon icône. Pouvais-je imaginer qu’il existait des miséreux ne connaissant pas ce blond miracle humain? Je suis donc sortie de là le cheveu ultra court mais avec ma couleur naturelle car « On ne décolorait pas les petites filles ». J’ai passé tout un été avec une coupe de cheveux qui faisait plus penser à Pierre Perret qu’à Mimsy Farmer! J’en suis encore mortifiée 40 ans plus tard!

mimsy farmer

Mimsy Farmer vient au monde le 28 Février 1945 à Chicago. Son père est américain mais sa mère française. Cette jeune demoiselle débutera comme figurante à la télévision américaines à l’âge de 16 ans, dans des programmes pour « teenagers ». C’est ainsi qu’on la verra passer, ombre fugace et à des années lumière de ce qu’elle deviendra plus tard, dans l’ombre de Deborah Walley, une des reines juvéniles des « Beach Party films ». Mais il n’y a pas que la télévision. Elle débute également au grand écran, toujours à 16 ans et pas dans n’importe quoi. Ni surtout avec n’importe qui. Dirigée par Delmer Daves, elle est la partenaire d’Henri Fonda et Maureen O’Hara dans « Spencer’s Mountains ».

Et si je dis que Mimsy est à des années lumières de ce qu’elle sera plus tard, c’est parce qu’elle ressemble à l’époque plus à une Sandra Dee qu’à la créature sexuellement libérée dont elle affichera plus tard l’image à la fois aussi simple qu’insolente. Il suffit pour s’en convaincre de revoir ses premiers petits rôles à la télévision où elle va quand même professer quatre ans et ses débuts au cinéma. jolie blonde en robes à fleurs et mise en plis bien rangée, il ne lui manque que les gants blancs et la messe du dimanche pour être la ravissante petite oie blanche du middle West comme l’Amérique de l’époque aime à les montrer. On la croirait tout droit sortie de la série « Mad Men »

mimsy farmer

Il faudra attendre 1969 pour que Mimsy Farmer nouvelle manière explose littéralement dans « More »! Un film électrochoc tourné à Ibiza alors en pleine période hippie et sur une musique originale des Pink Floyd! Difficile d’imaginer que la créature de perdition en microrobe (Quand elle la porte, évidemment) qui pousse un jeune touriste allemand dans la drogue et la luxure avant la mort est bien cette même Mimsy Farmer que l’on avait vue à la télévision dans « Lassie », « Laredo »,  »J’avais Trois Fils » ou « Mannix ».

Pour le cinéma, Mimsy sera estampillée « La jeune droguée de More ». On n’imagine pas alors qu’elle puisse être une jeune femme intelligente, timide, maladroite et très drôle…Et surtout aux antipodes de l’univers de More. Durant des années on ne lui proposera que des rôles de cinglées, au mieux des rôles de névrosés.

Elle reprendra sensiblement le même personnage pour Georges Lautner dans « La Route de Salina » où le réalisateur français fait d’elle la fille de Rita Hayworth. Mince, blonde, bronzée, ravissante incestueuse, cinglée et meurtrière.

mimsy farmer

Mimsy Farmer ne deviendra pas une actrice populaire. Forcément, avec une telle brochette de cinglées et autres dépravées à son actif, elle n’ a pas vraiment sa place dans le cinéma de papa. Elle deviendra une véritable icône pour toute une génération. Symbole d’une certaine féminité, d’un certain abandon des conventions sociales et pour tout dire d’une certaine liberté de mœurs mixé avec un idéal de beauté. Mimsy Farmer représente une génération de jeunes filles qui rejettent l’image de ces femmes fatales ou vénales qui ont fait les beaux jours du cinéma des décennies précédentes. On veut s’aimer nus au soleil et libérés des contingences morales et bourgeoises. C’est est fini des machinations machiavéliques à la Agatha Christie pour capter l’héritage de la grand’mère. C’en est fini du désarroi des femmes qui aiment des hommes mariés ou qui manœuvrent pour un vison et quelques diamants.

Brigitte Bardot avait ouvert la voie en bikini de vichy rose, aimant de beaux garçons sur les plages de St Tropez au lieu d’épouser de richissimes et puissants producteurs. Mimsy Farmer est un peu son œuvre accomplie, débarrassée des bikinis, des faux-cils et des postiches de Brigitte.

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La parenthèse enchantée dont Mimsy Farmer est le symbole sera de courte durée. Dix ans plus tard le sida et la mode BCBG viendront clore le chapitre. La réussite sociale redeviendra le saint graal de la génération suivante. Les contingences morales et bourgeoises feront leur retour plus puissants encore que par le passé puisque le tout va se  compléter par le retour d’un extrémisme religieux que l’on croyait aboli depuis la fin de l’inquisition.

La liberté des femmes n’aura été qu’une très courte période dans toute l’histoire de l’humanité. Et qui aurait cru que la génération de Mimsy Farmer remettrait son maillot puis son soutien-gorge avant de revendiquer le port du voile puis de la burka? Des siècles de combat pour dix années de victoire éphémère, il n’y a pas de quoi se vanter.

Aujourd’hui projeter « More » ou « La Route de Salina » outrage la jeunesse du XXIème siècle et Mimsy Farmer fait probablement figure d’antéchrist. Mieux encore. A la fin de la décennie « seventies » c’est elle qui est choisie pour être dans « L’amant de poche » une call girl amoureuse d’un garçon de 14 ans avec qui elle mène très naturellement et très ouvertement une liaison amoureuse et charnelle. Le tout sur un ton de comédie et non de pamphlet moralisateur.

mimsy farmer

Mimsy Farmer en ces temps bénis de liberté fut une actrice très sollicitée, tournant pour des réalisateurs pour le moins variés comme Georges Lautner, José Giovanni, les frères Taviani, Claude Goretta, Dario Argento, Barbet Schroeder et même…Terrence Hill. Elle aura même, comme Marilyn Monroe, Elizabeth Taylor, Brigitte Bardot ou Jayne Mansfield son alter ego en la personne de l’actrice Catherine Jourdan qui jouant sur les mêmes arguments qu’elle fera ses choux gras des films refusés par Mimsy Farmer l’icône.

Symbole de jeunesse, l’actrice ne cherchera pas à se perpétrer aux écrans et ralentit nettement son activité dès le début des années 80. En 1991 elle tourne un dernier téléfilm « Safari » dirigé par Roger Vadim et tire sa révérence. Elle est plus belle que jamais, elle a seulement 46 ans. Mimsy qui s’était fixée en France dès le début des années 70 y est restée. Elle a seulement quitté Paris pour s’installer dans le Var. Peintre et sculpteuse reconnue, toujours aussi gracieuse et restée très belle, elle met en scènes de grands spectacles de prestige pour le théâtre antique d’Orange ou l’opéra de Bordeaux.

C’est également dans les décors qu’elle fait parfois son retour au cinéma, là aussi dans des œuvres de grand prestige comme « Marie Antoinette » ou « Charlie et la Chocolaterie »

Mimsy est l’épouse du sculpteur Francis Poirier et elle est la mère de l’actrice et chanteuse Aisha Cerami

Celine Colassin

mimsy farmer

QUE VOIR?

1963: Spencer’s Mountain: Avec Maureen O’hara et Henri Fonda

1965: Bus Riley Back in Town: Avec Ann Margret et Michael Parks

1967: Hot Roads to Hell: Avec Jeanne Crain et Dana Andrews

1967: Riot on Sunset Strip: Avec Aldo Ray

1969: More: Avec Klaus Grünberg

1970: Strogoff: Avec John Philip Law et Hiram Keller

1970: Sur la Route de Salina: Avec Robert Walker jr. Rita Hayworth et Marc Porel

1971: 4 Mosche di Velluto Grigio: Avec Michael Brandon et Jean-Pierre Marielle

1972: La Vita in Gioco: Avec Guilio Brogi

1972: Corpo d’Amore: Avec François Simon

1973: Deux Hommes dans la Ville: Avec Alain Delon et Jean Gabin

1974: Les suspects: Avec Paul Meurisse et Michel Bouquet

1974: Allonsanfan: Avec Marcello Mastroianni, Léa Massari et Laura Betti

1975: La Traque: Avec Jean-Luc Bideau et Michael Lonsdale

1977:Antonio Gramsci: I Giorni del Carcere: Avec Pino Ammendola

1978: L’Amant de Poche: Avec Pascal Sellier et Madeleine Robinson

1978: Rêve de Singe: Avec Gérard Depardieu et Marcello Mastroianni

1979: SOS Concorde: Avec James Francisius

1980: La Légion saute sur Kolwezi: Avec Bruno Cremer et Guillano Gemma

1980: Même les Mômes ont du vague à l’Âme: Avec Marie-Christine Barrault et Guy Bedos

1981: The Black Cat: Avec Patrick Magee

1982: La Ragazza di Trieste: Avec Ornella Muti et Ben Gazzara

1983: Il Quartetto Basileus: Avec Véronique Genest, Pierre Mallet et Hector Altério

1983: La Mort de Mario Ricci: Avec Magali Noël et Gian Maria Volonte

1984: Don Camillo: Avec Terrence Hill

1987: Poisons: Avec Roland Dubillard et Rufus

1988:Il Segreto Dell’uomo Solitario: Avec Guilio Bosetti

 

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