Paule Roucole, la future Paule Andral naît le 14 Septembre 1879 à Paris. Sa mère est une actrice de théâtre célèbre, Henriette Andral dont Paule perpétuera la gloire du patronyme. Henriette, talentueuse et avisée avait jugé bon d’épouser Paul Ferrier, auteur dramatique à qui elle devait quelques jolis rôles. A la naissance de Paule, son père est enfin reconnu comme un auteur digne de ce nom et le tout Paris désormais l’acclame. Plus, il faut le reconnaître, pour ses oeuvres satiriques et vaguement polissonnes que pour la succession de Victor Hugo. Mais qu’importe. Il est à la mode, et la mode à Paris, c’est la seule chose qui compte! A l’heure où naît sa fille, il s’atèle à la rédaction de ses prochaines pièces: « Nos Députés en robe de chambre » et « L’Heure du Pâtissier »
Paule aura donc 20 ans pour inaugurer la « Belle Epoque ». Elle a d’abord subi une stricte éducation chez les religieuses puis s’est très sérieusement attelée à l’étude de l’art dramatique au conservatoire. Belle fille à la beauté altière et au port distingué, elle est une figure du « tout Paris » et côtoie beaucoup Paulus, Yvette Guilbert et Polaire. Mais sa grande, son immense fierté, c’est d’avoir été engagée par Paul Porel, alors directeur de l’Odéon et d’être devenue une amie intime de la grande Réjane, son épouse, à qui elle a donné la réplique et qui s’est littéralement entichée d’elle! Bien que Réjane soit de 23 ans l’aînée de Paule, ces deux-là s’entendent comme larronnes en foire! Réjane qui aura bientôt son propre théâtre et s’était faite forte de détrôner Sarah Bernhardt vit entourée de ses petits chiens et de toute une ribambelle d’amis dont Marcel Proust qu’elle a fini par installer à demeure! Mais c’est bien Paule qui est la plus présente, la plus proche, la plus fidèle, à un point tel que d’ailleurs, bientôt, dans Paris…On jase!
Ces deux-là s’en fichent comme d’une guigne! Corsetées par Worth sous des turbans du jeune Poiret, elles partent en tournée autour du monde, tournée qui s’achève en apothéose triomphale à New-York! Paule de retour en France restera une grande dame des scènes parisiennes jusque dans les années 30! Elle avait tâté des caméras dans deux courts métrages, en 1911 et 1913. Mais il était de bon ton alors pour les grandes dames du théâtre de s’enfuir en hurlant après s’être vues sur un écran et s’être bien entendu remises de leur évanouissement.
Mais il y eut une guerre, une guerre effroyable avec des tranchées, des gaz, des obus, des poilus et des gueules cassées. Le brave trouffion français étant paraît-il féru de cinéma, Paule aligna encore trois films pour soutenir le moral des troupes en ces périodes tracassières dont « La Belle Limonadière ». Sans doute l’ancêtre de la Madelon de Line Renaud et toujours dirigée par Jacques Capillani qui est un des seuls à pouvoir traîner Paule Andral devant les caméras. Hélas, le cinéma, cette chose, si elle distrait le combattant est désespérément muette, or, les mots, c’est le métier de Paule Andral.
Paule ne goûta que peu la fin des hostilités. En 1920 le destin la frappe à coup double, sa chère sa tendre amie Réjane meurt emportée par une crise cardiaque en Juin 1920, en septembre son père décède à son tour.
Au cinéma elle attendra donc que « ca parle » et l’an de grâce 1930 pour venir jouer les impératrices de Russie pour Raymond Bernard dans « Tarakanova »! Mais en 1930, Paule Andral a 51 ans! Trop tard pour affoler les populations en jeune première! Elle va alors aligner une jolie brochette de grandes dames, rarement aimables, souvent hautaines et parfois sottes. Trouvant devant les caméras une seconde carrière puisqu’elle va peu à peu délaisser les scènes. En 1937 elle domine encore souverainement la pauvre Gaby Morlay qui lui arrive tout juste à l’épaule pour jouer sa fille dans « Nuits de Feu » de Marcel L’herbier puis raccroche ses parures de diva. On la revoit furtivement dans »Le Royaume des Cieux » en 1949 qu’elle accepte pour faire plaisir à Julien Duvivier.
Paule Andral se retire, cette fois définitivement, comme il est d’usage pour les grandes dames de sa génération en cette bonne ville de Nice où elle s’éteindra le 28 Mars 1956.
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1917: Par la vérité: Avec Paul Mounet
1930: Tarakanova: Avec Edith Jéhanne
1931: David Golder: Avec Harry Baur
1931: La Ronde des Heures: Avec André Baugé et Gilberte Savary
1932: La Belle Aventure: Avec Kate de Nagy et Arletty
1933: L’Etoile de Valencia: Avec Brigitte Helm et Jean Gabin
1933: Le Maître des Forges: Avec Gaby Morlay
1935: Le Monde où l’on s’ennuie: Avec Josseline Gaël et André Luguet
1935: Dora Nelson: Avec Elvire Popesco et Micheline Cheirel
1936: Avec le Sourire: Avec Marie Glory, Marcelle Vallée et Maurice Chevalier
1949: Au Royaume des Cieux: Avec Monique Mélinand et Serge Reggiani