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Le 24 Novembre 1934, la petite Elizabeth, Simone, Clémence Hugon vient au monde à Boulogne sur Mer. Plus tard elle deviendra Sophie Daumier, nom de jeune fille de sa mère. Son père George est un compositeur et accessoirement directeur de l’école de musique. Avec un tel lignage, la petite Elizabeth que tout le monde appelle Betty sent poindre en elle la vocation artistique familiale. Douée pour le dessin elle envisage les beaux arts mais se passionne aussi pour la danse qui finira par avoir sa préférence.

Pour la petite demoiselle de la côte d’Opale, les choses iront très vite. Elle est élève à l’école de danse du théâtre du châtelet et réussit à partir en tournée avec la troupe pour danser le cancan alors qu’elle n’a que seize ans. Sur l’affiche elle devient Betty Hugon. On n’imagine pas trop une Elizabeth lever la gambette! Cette expérience sur les planches aura une grande incidence sur l’avenir de Betty puisque Betty il y a. Elle a adoré être en scène et sent confusément qu’il y a entre elle et le public une sorte d’élan de sympathie joyeuse. Betty se sent bien. Elle persévère.

Dès son retour à Paris elle enchaine les cours de chant, les cours de comédie à ses cours de danse et décroche un passage à « La Nouvelle Eve », un des cabarets les plus courus des années 50 en qualité de chanteuse fantaisiste. Betty Hugon devient alors Betty Laurent.

daumier sophie

Enfin un premier passage « sérieux » au théâtre où elle triomphera dans « Patate » durant six ans.  Avant que le rôle n’échoue (c’est le cas de le dire) à Sylvie Vartan  au cinéma. A l’époque du triomphe de « Patate », le tout Paris avait fini par s’émouvoir pour cette jeune première qui devait refuser toutes les propositions qu’on lui faisait, prisonnière de son succès au théâtre. La pièce devint « Piège pour Sophie Daumier » pour quelques journalistes qui suivaient l’affaire de près. Elle avait fini par être surnommée « mademoiselle Patate » tant elle semblait devoir tenir le rôle à tout jamais!

Elle débute enfin au cinéma en 1956, très bien entourée dans « Paris Canaille »! Un petit film sans grande prétention mettant en vedettes Dany Robin, Daniel Gélin et la sulfureuse Tilda Thamar et où elle partage ses scènes avec Yoko Tani et Danick Patisson. Et si Pierre Gaspard Huit est à la mise en scène, le scénario est signé Cecil Saint Laurent qui fit tant pour la gloire de Martine Carol en écrivant Caroline Chérie. Sa grande chance viendra l’année suivante. Elle est choisie pour être la fille d’Edwige Feuillère et Bernard Blier dans « Quand la femme s’en mêle ». Un « série noire » très raté mais où Sophie aura l’insigne honneur d’être la première amoureuse à l’écran du futur numéro un du cinéma: Alain Delon. Delon qui débute en tombant amoureux d’elle (dans le film) et en lui offrant une glace à la framboise avant d’aller dézinguer vite fait un ou deux gangsters sur le trottoir d’en face!

sophie daumier

Sophie Daumier, puisque Sophie Daumier il y a, enchaîna quelques joyeux tournages, jeune première d’un cinéma populaire, noir et blanc et surtout bon enfant.

Si sa popularité fait d’elle tantôt « un espoir », tantôt une « jeune vedette », tantôt une « révélation » elle est bien consciente que ce n’est pas avec les films gentillets qu’elle tourne qu’elle risque de devenir une star. Alors elle fait contre mauvaise fortune bon cœur. Elle s’étourdit à danser le twist et file un tendre amour avec un scénariste qui restera très confidentiel: Bernard Imbaud. Et puis, à force d’ensoleiller les nuits parisiennes, elle va faire une conquête plus inattendue: celle de Vince Taylor! Le rocker est visiblement très amoureux de sa blonde et pétillante Sophie mais celle-ci déclare: « J’ai envie d’amour mais pas d’habitudes! Or le mariage en est une! Et puis, comme mon vrai prénom est Elizabeth, si j’épousais Vince je deviendrais officiellement madame Elizabeth Taylor!

En 1965, elle sera l’amoureuse de l’autre numéro un du cinéma français: Jean-Paul Belmondo dans « Par un Beau Matin d’Eté ».  Par contre, la production américaine de « Patate » lui a préféré comme on l’a vu Sylvie Vartan, alors propulsée au sommet de la célébrité avec « La plus belle pour aller danser ».

SophieDaumier

Contre mauvaise fortune bon cœur, Sophie est quand même devenue une vedette de cinéma. Un cinéma où elle rivalise avec Etchika Choureau,  Estella Blain, Mylène Demongeot, Dany Saval ou Danik Patisson qui jouaient sur les mêmes arguments qu’elle. Un cinéma qui avait crée Brigitte Bardot, avec qui Sophie partage presque une date de naissance, Brigitte est l’aînée de Sophie de deux mois mais aussi un certain physique à la moue boudeuse très dans l’air du temps. Un physique qui devient le symbole absolu de la beauté féminine et du sex appeal de cette fin des années 50. Bardot est le nouvel idéal féminin, Toutes les actrices s’engouffrent dans la spirale des sosies, de Catherine Deneuve à Mylène Demongeot jusqu’à Jane Fonda. Sophie suit le mouvement.

Quoi de plus naturel?

Si Brigitte est le symbole de son époque c’est qu’elle correspond à l’époque en question. Affichant une vie libre qui semble dissolue et qui ne fait que piétiner les conventions bourgeoises corsetées par Christian Dior. Le couturier aimait les tailles serrées, les jupes aux cheville et les caniches toilettés. Brigitte préfère vivre nue au soleil et répugne à se peigner elle-même. La célébrité de Bardot est intersidérale! Chacun de ses faits et gestes provoque un scandale effarouché. Mais gageons que si Sophie avait été aussi célèbre que BB en son temps, elle aurait tout aussi bien défrayé la chronique! N’est-elle pas une maman célibataire d’un petit Christian?

Après les années 50 vinrent les années 60

La nouvelle vague déboulonnait tout sur son passage, ringardisant le cinéma de Sophie.

Sophie Daumier

Elle se fichait bien de savoir si Godard ou Lelouch allaient faire appel à elle. Elle avait son cher théâtre où elle servait Anouilh, elle restait sollicitée, elle avait son fils de 7 ans, nous étions en 1963. Sur le plateau de « Dragées au Poivre », elle retrouvait un jeune acteur qu’elle avait déjà croisé au théâtre dans « Cyrano »: Guy Bedos. Bedos faisait du rire son arme. Son humour cinglant émerveilla Sophie. Ces deux là allaient devenir un des couples les plus en vue de la décennie. Ils se marient en 1965. C’est Sophie qui a souhaité légaliser leur relation et dans la foulée elle souhaite que Guy Bedos reconnaisse son fils Christian. L’auteur-acteur-humoriste est d’ailleurs étonné de cette soudaine soif de respectabilité chez Sophie mais accepte pour faire plaisir à celle qu’il aime, qui est sa compagne dans la vie et sa partenaire sur scène. Mon cadeau de mariage plaisante-il!

Le couple Daumier-Bedos devient le team d’humoristes préféré des Français. Leur humour irrévérencieux qui n’épargne rien ni personne (N’est-ce pas Sophia Loren!) balaie la génération des Fernand Raynaud et ouvre la voie aux Coluche et autre Pierre Desproges. Ils réussiront la prouesse inimaginable de voir un de leurs sketches « La Drague » sortir en 45 tours et passer en boîte de nuit tout en plafonnant en tête de tous les hit parades!

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Evidemment, comme le cinéma français n’aime rien tant que de mettre des étiquettes aux gens, Sophie fut cataloguée « humoriste épouse Bedos » et les propositions se raréfièrent! Après l’ennui de la nouvelle vague, le cinéma français découvrait la morne platitude du cinéma érotique à deux ronds, Sophie n’était pas Sylvia Kristel et se portait fort bien d’être « oubliée »! Elle n’était pas du genre à se prendre le chou pour un rôle et gardait un côté « bonne franquette et bande de copains ». Lorsque Guy Bedos part tourner à Issoire « Les Copains » avec Philippe Noiret et Pierre Mondy, elle appelle les épouses de ces messieurs et puisqu’elles sont libres d’engagements, les voilà partie pour quelques jours de vacances fou-rires entre filles à Issoire. Etrange tournage où on pouvait croiser Pascale Roberts, Monique Chaumette et Sophie Daumier alors qu’elles ne sont pas dans le film mais en vacances.

Elle préférait aussi, plutôt que de batailler pour un rôle, collectionner les chaussures à semelles compensées aux couleurs criardes (qui feraient aujourd’hui l’admiration de Victoria Abril. Je suis sûre qu’elle les échangerait contre un oeil ou un bras!  Elle préférait travailler avec Guy Bedos qu’avec un illustre quelconque, s’occuper de son fils et taire le drame qui obscurcissait maintenant sa vie. Depuis quelques temps, sa maman était malade. Sa santé se dégradait en même temps que son mental se délabrait. Encore peu connue à l’époque, la maladie de Huntington fut finalement diagnostiquée. Une maladie incurable, une maladie orpheline, une maladie génétique et…Une maladie héréditaire.

SophieDaumier

En 1977 elle divorce de Guy Bedos et Claude Sautet fait appel à ses services pour donner la réplique à Romy Schneider dans « Une Histoire Simple ». Hélas la maladie la frappe à son tour. Peu à peu l’état de Sophie dégénère et après quelques années de lutte elle doit renoncer à toute activité puis à tout ce qui faisait sa vie.

Sophie Daumier va s’enfoncer dans la souffrance, dans une dégénérescence qui va durer près de vingt ans. Guy Bedos la soutiendra tant qu’il le pourra. En 1996, c’est son fils qui à son tour développe la maladie fatale héritée de sa mère et de sa grand’mère. Sophie déjà ne le comprends plus.

Elle s’éteint la nuit du nouvel an 2004. Elle avait eu 69 ans un mois plus tôt.

Son fils la suivra dans la tombe le 11 Décembre 2010 après 14 ans de calvaire sans espoir.

Celine Colassin

sophie daumier

QUE VOIR?

1956: Paris Canaille: Avec Dany Robin, Tilda Thamar et Daniel Gélin.

1956: Les Collégiennes: Avec Gaby Morlay et Catherine Deneuve

1957: A Pied, à Cheval ou en Voiture: Avec Noël-Noël et Denise Grey

1957: Quand la Femme s’en Mêle: Avec Edwige Feuillère, Alain Delon et Bernard Blier.

1958: A Pied, à Cheval et en Spoutnik: Avec Denise Grey, Noël-Noël et Francis Blanche

1958: Les Femmes sont Marrantes: Avec Micheline Presle et Yves Robert

1958: Chéri fais-moi peur: Avec Darry Cowl, Tilda Thamar et Pierre Mondy

1959: Bal de Nuit: Avec Pascale Audret

1961: Les Croulants se Portent Bien: Avec Nadia Gray, Fernand Gravey et Pierre Dux

1961: Amélie ou le Temps d’Aimer: Avec Marie-José Nat et Clotilde Joano

1962: Un Chien dans un jeu de Quilles: Avec Elke Sommer et Christian Marquant

1963: Dragées au Poivre: Avec Guy Bedos et Jean-Paul Belmondo

1963: Carambolages: Avec Louis de Funès et Jean-Claude Brialy

1964: L’Amour à la Mer: Avec Geneviève Thénier et Jean-Pierre Léaud.

1965: Par un Beau Matin d’Eté: Avec Jean-Paul Belmondo

1965: Pas de Caviar pout Tante Olga: Avec Dora Doll, Pierre Brasseur et Francis Blanche

1965: Cent Briques et des Tuiles: Avec Marie Laforêt et Sophie Dumier

1973: Pouce: Avec Guy Bedos

1977: Violette et François: Avec Isabelle Adjani et Jacques Dutronc

1978: Une Histoire Simple: Avec Romy Schneider et Bruno Cremer

1978: Freddy: Avec Pierre Doris et Jean Lefébvre

 

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