Pauvre Valérie Hobson! Se retirer encore au sommet d’une carrière de grande classe pour faire une fin conjugale dans la gentry et se retrouver traînée dans la boue du scandale le plus sulfureux de la guerre froide!
Franchement elle ne méritait pas ca.
Mais commençons par le début…
Babette Valérie Louise Hobson naît en Irlande bien que ses parents soient anglais le 14 Avril 1917. Son père est officier de marine. Enfant précoce et surdouée, elle recevra un premier prix de danse à l’âge de deux ans. Dès cet instant elle ne cessera d’affirmer son inébranlable volonté de devenir un jour danseuse étoile, la plus grande de toutes. C’est une scarlatine dont elle se remettra difficilement qui aura raison de cette ambition première.
Elle se consolera en étudiant l’art dramatique comme une véritable acharnée. Petite fille, elle s’était déjà glissée en cachette dans la file d’aspirantes comédiennes qui attendaient devant un théâtre leur tour d’audition. Elle n’a que 14 ans lorsqu’elle recommence, se présentant maquillée et en talons pour un rôle de belle amoureuse qu’elle obtient! Hélas elle perd le rôle lorsqu’on découvre son âge.
Elle est encore une très jeune femme lorsqu’elle débute au cinéma. Grâce comme on s’en doute, à un gracieux physique et non à une grande expérience de l’art dramatique. Même si, elle a été choisie alors qu’elle jouait triomphalement « Bal au Savoy » de Drury Lane sur scène. Elle avait comme toutes les jeunes aspirantes à la gloire fait quelques figurations et un peu tourné pour le cinéma où elle avait d’ailleurs fait d’intéressantes choses.
Mais ses débuts, ses vrais débuts dans le vedettariat seront, c’est le moins que l’on puisse dire deux coups de maître. Elle est d’abord la fiancée de ce bon docteur Frankenstein. A 18 ans à peine. Elle enchaîne ensuite avec un saisissant film de loup garou, « Werewolf of London » qui terrifia tout Londres pour la bonne raison qu’il était le premier du genre. Ses succès sont d’autant plus profitables à sa jeune carrière que ce sont des productions américaines d’Universal.
Arrivée à Hollywood pour y être sacrée superstar, Valérie ne se montrera guère convaincue. Elle argumentera le « mal du pays » pour rentrer chez elle. Elle fait bien, Alexander Korda l’attend.
La jeune comédienne, propulsée au sommet de la notoriété en deux films réussira une autre prouesse non négligeable. Elle ne restera pas cantonné dans un cinéma « de genre » mais glissera de l’épouvante aux comédies romantiques les plus élégantes et les plus raffinées de l’époque. Portant le costume à ravir, parfaite sur le texte elle va devenir l’emblème d’une certaine distinction british dont le public est littéralement fou.
Qui de plus est, elle tient l’intérêt du public de film en films sans jamais se vautrer dans le stupre, la luxure ou les bas fonds. On finira par parler d’elle comme de l’actrice la plus digne, la plus chaste et la plus respectueuse des traditions…Ce qui n’est pas tout à fait exact.
Valérie est en réalité loin de jouer les bégueules et on sent plus d’une fois le feu couver sous la glace et l’émoi sensuel mettre à mal ses dignes corsets victoriens!
Lorsque le monde entre en guerre, Valérie Hobson est une très grande vedette du film et des scènes. C’est également en 1939 qu’elle convole avec Sir Anthony James Allan Havelock-Allan, producteur de 13 ans son aîné et accessoirement, 4ème baronnet. C’est pour le moins un très beau parti puisqu’alors les bonnes conventions aiment qu’un mari soit plus riche et plus âgé que sa moitié.
En 1944 leur naîtra un fils, Simon. Malheureusement souffrant du syndrome de Dow. Simon est un enfant trisomique. Il aura toute sa vie l’esprit d’un enfant de huit ans. Le couple aura un deuxième fils, Mark qui vient au monde le 4 avril 1951 mais à l’heure de cette naissance, les jours du couple sont comptés. L’année suivante ils divorcent après 13 ans de mariage.
Durant son mariage, Valérie a bien entendu beaucoup joué dans les films produits par son mari et parfois mis en chantier à sa seule intention. Mais elle a eu l’intelligence durant ces 13 ans de rester une comédienne curieuse et disponible, ouverte à d’autres propositions théâtrales ou filmées dans lesquelles son mari n’a rien à voir ni à dire. Sa liberté reprise elle n’a qu’à se pencher pour choisir dans les piles de scénarii qui s’amoncellent sur son bureau et qui ne cessent de pleuvoir.
En 1954, Valérie se marie pour la seconde fois, un mariage bien dans le style « Hight society » du premier!
Elle épouse le très distingué John Dennis Profumo.
A l’heure du mariage, Profumo est sous-secrétaire parlementaire d’Etat aux Colonies depuis un an. En Janvier 1957, il devient sous-secrétaire parlementaire d’Etat au Foreign office. En Novembre 1958, il est nommé ministre d’État aux Affaires étrangères. En Juillet 1960, il a devient secrétaire d’état à la guerre.
Après son mariage, Valérie qui frôle les 1000 représentations avec « Le Roi et Moi » au théâtre annonce renoncer à sa carrière bien que son mari ne lui ait pas demandé. Elle estime que jouer la comédie de l’amour dans les bras d’autres hommes à l’écran est peu compatible avec les fonctions conjugales de monsieur. Elle aurait d’ailleurs pu arrêter un peu plus tôt. Mais René Clément lui proposait d’être la partenaire de Gérard Philipe dans « Monsieur Ripois. Cela se refuse-il? Cet ultime rôle lui permettrait de prouver aux historiens du futur, si tant est qu’on en eût douté, qu’elle avait renoncé à sa carrière alors qu’elle était au sommet d’une renommée internationale jouant avec et pour les plus grands.
Et donc, les jours où les Profumo ne seront pas en représentation officielle, elle s’occupera des enfants, ira au cinéma, préparera le dîner et rangera enfin sa collection de timbres précieux. Le couple aura un fils, David Profumo né en Octobre 1955.
Valérie Hobson devient une habituée des hautes sphères. La femme de ministre dont on ne parle pas du passé d’actrice sous le nom de Valérie Hobson. Elle est une sorte de Mélanie Wilks qui graviterait dans les plus hautes sphères.
Et puis un jour c’est l’explosion. Le cataclysme, Le raz de marée.
Son mari est l’épicentre du scandale sexuel du siècle. En tout cas sur l’ile des buveurs de thé.
L’affaire la plus sulfureuse de toute l’histoire de la guerre froide.
Si certains parlent de « l’affaire Christine Keeler », c’est bien du scandale Profumo qu’il s’agit.
Et de quoi s’agit-il?
Christine Keeler une call girl de haut vol serait la maîtresse rémunérée de Profumo à qui il confie des secrets d’état qu’elle s’empresse de négocier avec le bloc de l’est. La presse s’en empare. Christine Keeler devient une star elle se fait payer ses interviews au mot!
On tourne des films sur l’affaire alors qu’elle est en cours d’instruction. Le rôle de Christine Keeler est le rôle le plus convoité du monde. Tous les producteurs se traînent à ses pieds pour qu’elle s’auto incarne dans un film qui dévoilerait toute la vérité. C’est à dire qu’elle y serait nue du début à la fin. Si l’URSS a un de ses ressortissants impliqué, le front de l’Est fait bloc et l’homme est littéralement mis au secret. l’Angleterre, par contre, démet Profumo de toutes ses fonctions et le livre en pâture à la presse avec à son bras la pauvre Mélanie Wilks Hobson qui tente de sauvegarder quelques lambeaux de dignité. Certes, elle est offusquée. La presse unanime la considère comme le gros dindon conjugal de la farce. La femme la plus trompée d’Angleterre par un homme à qui elle a tout sacrifié.
Un tabloïd titrera « Valérie Hobson: « Mon mari préférait payer ailleurs ce que je le suppliais d’encore accepter gratuitement de moi »!
Elle gardera la tête haute. Maigre consolation quand votre monde s’écroule. Elle fera front au bras de son mari malgré les quolibets, les rires et quelques insultes. Un autre article parlant d’elle au moment de l’affaire dira « Flanqué de son épouse que l’on croyait discrète et distinguée et qui n’était qu’idiote et bafouée » Il faut dire que l’affaire éclatant en 1963, Profumo et Keeler avaient des relations depuis 1958! »L’affaire » éclatant dans une période pauvre en évènements croustillants fera la une au quotidien durant des mois sans que rien dans l’actualité ne soit suffisamment intéressant pour la chasser des esprits. l’affaire Profumo réunissait tous les atouts pour faire un scandale « longue duré ». Des politiciens, du pouvoir des filles, des espions, des enquêtes des procès, du sexe, et même un suicide, rien ne manque pour faire un succès!
Et pourtant, dans les faits, Christine Keeler prostituée sans grand prestige ni esprit avait dans sa clientèle monsieur Profumo et entre d’autres messieurs intéressés un attaché de l’ambassade soviétique. Lorsque quelqu’un attaché à la sécurité de Profumo alors secrétaire de la guerre, s’en rendit compte, ignorant que Christine Keeler était plus bête qu’elle n’en avait l’air crut à une nouvelle affaire Mata Hari et sonna l’alarme. L’affaire dont Christine Keeler fut la première étonnée défraya tant la chronique qu’elle essaya, grisée, d’en tirer gloire et profit, la faisant durent le plus longtemps possible comme n’importe qui le ferait d’une aubaine inespérée. C’est finalement elle qui écopera de 9 mois de prison pour faux témoignage. Il est vrai pour une autre affaire, une fusillade des rues basses cette fois.
L’Eléphant accoucha d’une souris mais Profumo ne retrouva pas ses fonctions ministérielles. Ni celles là ni d’autres.
Le couple Profumo s’empressa de se fondre dans une discrétion de bon aloi. On ne les verra pour ainsi dire plus jamais sauf pour quelques apparitions où ils semblaient dire au monde »Tout ca n’était que fariboles, nous sommes sortis grandis de l’épreuve et nous nous aimons plus que jamais celà a rendu notre couple plus fort et plus uni ». Certains trouvèrent que c’était là la moins bonne performance d’actrice de Valérie Hobson.
Le 13 Novembre 1998, Valérie Hobson s’éteignait dans sa 81ème année sans que personne ne semble s’en apercevoir.
John Profumo finit lui aussi par mourir. C’était le 9 mars 2006 et tout le monde en parla. L’affaire Profumo surgit de passé et l’on sortit pour l’occasion Christine Keeler de sa retraite…Au cas où elle aurait encore quelque chose de bien stupide à dire.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1932: His Lordship: Avec Janet McGrew
1933: Eyes of Fate: Avec Allan Jeayes
1934: Badger’s Green: Avec Bruce Lester
1934: The Path of Glory: Avec Maurice Evans
1934: Life Returns: Avec Onslow Stevens et Loïs Wilson
1935: Mystery of Edwin Drood: Avec Claude Rains et Heather Angel
1935: Rendez-vous at Midnight: Avec Ralph Bellamy
1935: Bride of Frankenstein: Avec Boris Karloff et Elsa Lanchester
1935: Werewolf of London: Avec Henry Hull et Warner Oland
1936: August Week End: Avec Paul Harvey
1936: No Escape: Avec Billy Milton
1937: Jump for Glory: Avec Douglas Fairbanks jr.
1939: Q Planes (Clouds over Europe): Avec Laurence Olivier
1939: The Spy in Black: Avec Conrad Veidt
1939: The Silent Battle: Avec Rex Harrison et John Loder
1942: Unpublished Story: Avec Richard Greene
1949: Great Expectations: Avec John Mills
1949: The Interrupted Journey: Avec Richard Todd
1949: The Rocking Horse Winner: Avec John Howard Davies
1952: The Card: Avec Glynis Johns et Alec Guinness
1952: Monsieur Ripois: Avec Gerard Philipe